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En 2005, je me rends compte que tous les livres que je lis comportent le mot «ange» dans le titre…
Cette légende de Nancy Huston dans Nostalgie de l’ange ne m’a jamais quittée : «Savez-vous pourquoi nous avons tous deux traits au-dessus de la lèvre ? Parce que lorsque nous venons au monde, nous savons tout, nous connaissons tous les secrets et un ange vient poser son doigt pour nous dire – Chut ! -.». Comme si elle ne faisait que confirmer ce que je «sentais» depuis toujours.
En observant dans la pratique du yoga avec le souffle, en regardant comme je suis avant la posture, après, avant une pratique, après, il me semble «retoucher» ce secret.
Comme si cet enfant qui a du obéir et refouler ses sentiments, qui est devenu un adulte qui ne savaient plus se poser de questions sans se laisser le temps ou la permission d’explorer et de sentir, on lui disait tout à coup « tu as le droit » et pas « tu dois », « je te propose » et pas « il faut ». Ceci aura été mon premier retour de la part d’un élève en tant que professeur de yoga : « comme c’est doux pour une fois de ne pas entendre d’ordre ».
Spontanément, nous nous demandons : «Tout ce que nous avons perdu et détruit, cherché et réclamé, volé et oublié… en essayant de réparer les dégâts dès le début… quand nous étions trop petits pour nous défendre, expliquer, retenir…»
Enfant, le monde entier est « enfermé » dans le regard des parents.
Les mots de M. Manzano me font profondément écho : «On ne comprend pas la moitié de ce qui arrive. Pourquoi il n’y avait personne ce jour-là. Surtout si le lendemain, personne ne dit rien. Et le surlendemain toujours rien… Alors on cherche une explication, quelconque. Et souvent, on finit par se convaincre que c’est forcément notre faute… autrement il n’en aurait rien été… autrement elle ne serait pas partie…»¹
Pour un enfant de 18 mois par exemple, une semaine équivaut à huit mois.
On doit certes mettre dans la balance les besoins de l’âme de l’enfant et son besoin de sécurité, de soins, ainsi que des notions soigneusement examinées de «conduite civilisée». Mais je m’inquiète toujours pour ceux qui sont trop bien élevés ; on voit souvent ce regard d’une «âme faible» dans leurs yeux. Quelque chose ne va pas. Une âme en bonne santé doit briller, la plupart du temps et flamboyer les autres jours. Quand la blessure est grave, l’âme s’enfuit.²
La maladie m’a aussi obligée à rentrer en contact avec moi-même. En me clouant dans une chambre d’hôpital pendant deux semaines avec des fils partout, je n’ai eu d’autres choix et celui-ci était vital que de me poser et de renouer avec un travail intérieur plus profond que j’avais déjà entamé, touché mais dont les plus ou moins difficiles étapes de la vie m’avaient éloignées.

«Et j’ai bien manqué mourir. Jusqu’au jour où j’ai accepté de me briser et de laisser le vent m’emporter.»
« Il est bon de préserver des moments de calme, où il ne se passe « rien ». Dans ces instants, souvent avant que les enfants se couchent, ou quand ils attendent de s’endormir, des occasions de créativité, de partage et de connexion apparaissent. Le monde s’est arrêté. »
Jon et Myla Kabat-Zinn,
extrait de « A Chaque jour ses prodiges »

¹ M. Manzano Légère comme un papillon
² C. P. Estés Femmes qui courent avec les loups